216                          HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
mort de ce prince et le retour de la cour à Paris entraînèrent proba­blement sa suppression, ll aurait donc vécu une trentaine d'années; c'était assez, à coup sûr, pour laisser des vestiges de son activité.
Depuis qu'on s'occupe avec méthode de l'histoire des anciens métiers, on a retrouvé un certain nombre de pièces qui peuvent être attribuées, selon toute vraisemblance, à la première manu­facture royale de tapisseries. Les artisans placés sous la haute direction du Primatice semblent avoir été particulièrement occupés à copier des sujets à rinceaux et à grotesques. Sans doute ils ne s'en sont pas tenus là. Nous avons constaté plus haut que Matteo del Nassaro avait donné des modèles représentant Actéon et Orphée; mais le type caractéristique des productions de Fontainebleau con­siste surtout, c'est un fait à peu près reconnu, dans cles composi­tions à arabesques qui rappellent les charmantes fantaisies de Ducerceau. On en jugera suffisamment par le rapprochement de la belle pièce appartement à M. Maillet du Boulay, dont nous don­nons ci-dessus le dessin (page 209), et du panneau de grotesques, d'après Ducerceau, placé à la page suivante.
Une récente découverte a mis en lumière d'autres pièces où le goût bien français des fines arabesques de Ducerceau se recon­nait à première vue. Un cartouche central, contenant un groupe mythologique, peut-être une allégorie aux saisons, est entouré d'un fond vert-bleu semé de figures, d'animaux, de fleurs, de vases, de guirlandes, de caprices d'une extréme délicatesse, fort ingénieusement reliés les uns aux autres. On trouvera ici le dessin de deux de ces pièces, dont la composition répond merveilleuse­ment à l'idéal décoratif de la tapisserie. C'est d'abord un fragment mutilé appartenant à M. Emile Peyre (page 215), avec un panneau central représentant Bacchus ; puis une pièce presque intacte (p. 213), sauf les bordures du haut et du bas, récemment acquise pour le musée de la manufacture des Gobelins, au milieu de laquelle figure Cybèle entourée d'enfants et d'animaux.
La bordure identique de ces panneaux prouve qu'ils appartiennent à une même suite consacrée, soit à la représentation des Saisons, soit à celle des dieux de l'Olympe.
M. Darcel a remarqué que le principal élément de cet encadrement consiste en deux croissants adossés, étoffés de quelques ornements; ceci suffirait pour dater ces pièces du règne de Henri II. Nous trou­vons par surcroit, sur la tapisserie acquise pour le musée des Gobe-